La montagne ardente (tome 3)

Publié le par diane beausoleil

3ème partie : Dona Libertad ou le livre du feu.

 

         Quelques minutes plus tard, ils pénétrèrent dans une maison où régnait un indescriptible charivari. On eût dit que les murs allaient éclater sous la pression de tant de bruit, de mouvement et d'énergie concentrés en un lieu si étroit. Dans un coin, un orchestre rudimentaire jouait, composé d'un tambourin, d'une guitare et de deux flûtes. Des gens dansaient sur place ou presque, pour éviter de percuter les voisins. Dans un autre coin, une table, chargée de boissons et de nourriture. En entrant, Lysiane avait cru défaillir. Elle n'avait jamais supporté les ambiances de foule surchauffée, moins encore dans l'état d'épuisement où elle se trouvait. Mais aussitôt, d'entendre la belle musique indienne qu'elle aimait tant depuis son adolescence, elle se sentit ranimée et comme rajeunie. Les musiciens jouaient un air de la cantate Santa Maria de Iquique, et elle se mit à le fredonner :

« Vamos, mujer, partamos a la ciudad… »

Et malgré la fatigue, elle éprouva une joie profonde, comme un exilé qui, après une longue errance, retrouve la terre perdue.

         Don Eleuterio lui dit une phrase qu'elle ne comprit pas, et à travers la foule, la conduisit jusqu'au buffet. Une femme lui sauta au cou :

         "Lerio, trésor de mon coeur, tu es revenu ! Nous étions très inquiets pour toi."

         C'était une belle matrone, brune et vermeille, douée d'une voix si puissante qu'elle dominait le vacarme :

         "Avons-nous soif, compère ? demanda-t-elle.

         - Donne-moi du chaud, pour l'amour de Dieu.

         - Voici du bouillant, pour l'amour de toi."

 

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